samedi 19 février 2011

Cours magistral sur la cyber-opposition par un agent secret cubain


La vidéo d'une conférence publiée sur le site de partage Vimeo montre un homme qui donne un cours accéléré sur les médias sociaux et le Web devant un parterre d'agents de renseignement cubains. Une démonstration pendant laquelle il explique que les blogs d'opposition sont financés par les États-Unis pour assurer "la contre-révolution à Cuba".

L'instructeur de ce cours a été identifié par le blog Penultimos Dias comme un officier de renseignement travaillant pour le ministère de l'Interieur. Il s'appellerait Eduardo Fontes Tato Suarez. Il explique pendant une heure comment les nouvelles technologies sont utilisées par les cyber-militants du monde entier. Et comment selon lui les États-Unis "tentent de transformer les blogueurs en une nouvelle catégorie d'ennemis de l'État".

Le "professeur" Fontes poursuit en soulignant que les blogueurs comme Yoani Sanchez (Observatrice de longue date de FRANCE 24), auteur du blog Génération Y, sont très suivis sur Twitter et risqueraient d'organiser à La Havane des manifestations similaires au "mouvement vert" lancé sur Internet en Iran en 2009.

Eduardo Fontes assure que les ONG fondées par les jeunes générations americano-cubaines sont différentes des "groupes terroristes historiques comme la Cuban American National Fundation [CANF, basée à Miami]". Historiquement, les activistes cubains en exil tels que la CANF exercent un lobbying à Washington auprès des parlementaires pour défendre avec acharnement les mesures anti-Castro comme l'embargo décrété par les États-Unis et l'interdiction de voyage des citoyens américains sur l'île. Mais ces dernières années, les jeunes générations d'Américains d'origine cubaine ont tenté de promouvoir une libéralisation politique entre les États-Unis et Cuba. Et contrairement à leurs aînés, affirme Eduardo Fontes, ces nouvelles ONG et leurs communautés en ligne ont le pouvoir de "tromper la jeunesse cubaine" en présentant la révolution cubaine sous un jour négatif.
Cette vidéo a été tournée en juin 2010, mais elle n'a fuité sur Internet qu'il y a quelques jours. Elle a particulièrement attiré l'attention à un moment où Internet et les réseaux sociaux sont utilisés par les jeunes à travers le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord pour organiser des émeutes anti-gouvernementales qui ont déjà abouti à la chute de Ben Ali en Tunisie et d'Hosni Moubarak en Égypte.

 Extraits sous-titrés en français par France 24. Pour la vidéo en intégralité voir ci dessous.

 

"Comme ils le reconnaissent eux-même dans cette vidéo, nous [Roots of Hope] sommes une menace pour eux."


Felice Gorordo est le co-fondateur de Roots of Hope [Les racines de l'espoir], une des organisations que Eduardo Fontes attaque dans la vidéo. Roots of Hope a organisé le concert de la rockstar colombienne Juanes en septembre 2009. Dans la vidéo, Eduardo Fontes blâme Roots of Hope d'avoir voulu annuler le concert. En fait, Juanes avait menacé de tout annuler si Cuba refusait d'assouplir les mesures de sécurité.

"Comme ils le reconnaissent eux-même dans cette vidéo, nous [Roots of Hope] sommes une menace pour eux. Il est clair que le gouvernement cubain ne sait pas comment gérer notre message apolitique qui ne vise qu'à accroître les contacts entre les Cubains de l'île et les Cubains exilés."

Suite à la légalisation de l'accès à la téléphonie cellulaire en 2008 par le président Raul Castro, Roots of Hope a lancé un projet qui vise à donner à chaque Cubain un téléphone portable neuf dont il pourrait se servir à sa guise.

Internet à Cuba ne fonctionne pas comme dans d'autres pays communistes tels la Chine ou le Vietnam, où le Web est généralement accessible en dépit d'un niveau élevé de contrôles gouvernementaux. À Cuba, l'accès à l'Internet légal n'est disponible que pour un groupe privilégié de représentants du gouvernement et de médecins ou en achetant des cartes prépayées dans des hôtels qui coûtent l'équivalent de 12 euros l'heure. Sachant qu'à Cuba, le salaire moyen est d'environ 15 euros par mois, Internet est un luxe pour la plupart des Cubains. Ce prix prohibitif est aussi une forme efficace de censure gouvernementale. La plupart des Cubains se connectent donc illégalement en ayant des connexions extrêmement lentes.

"Le gouvernement a le pouvoir d'appuyer sur le bouton qui coupe Internet plus rapidement et plus longuement qu'Hosni Moubarak l'a fait en Égypte"

Ernesto Hernandez Busto vit à Barcelone. Il est essayiste et rédacteur en chef du blog Penultimos Dias. Dans la vidéo, Eduardo Fontes l'accuse nommément d'être à la solde de la CIA.

"Le gouvernement est le seul fournisseur d'accès Internet existant à Cuba. Il a le pouvoir d'appuyer sur le bouton qui coupe Internet plus rapidement et de manière plus efficace que le président Hosni Moubarak l'a fait en Égypte. Cette vidéo est vraiment la preuve que la mentalité de la guerre froide subsiste encore aujourd'hui.

Ce que nous voyons aussi, c'est que le gouvernement cubain est à un carrefour. D'une part, ils comprennent qu'ils ont un besoin urgent d'Internet pour fonctionner, en particulier avec la nouvelle série de réformes économiques qu'ils envisagent de mettre en œuvre dans les années à venir. Les gestionnaires d'hôtels doivent être en mesure de répondre à la demande et organiser l'accueil des clients par e-mail, de même que les policiers doivent être en mesure d'envoyer des documents par voie électronique d'une ville à l'autre.

D'autre part, ils savent qu'en donnant un accès internet à l'île par l'installation d' un câble sous-marin, ils ne pourront plus contrôler à 100 % les connexions. Quand une personne se connecte à la Toile, le gouvernement cubain peut tenter de la censurer, mais jamais de la contrôler complétement."

Ci-dessous la vidéo originale non sous-titrée en intégralité. Pour une transcription complète en anglais cliquez ici.


  • Home
  • Aucun commentaire:

    Enregistrer un commentaire